lundi 19 octobre 2009

Comment traiter son patron de « gros con » sans se faire virer



Faut-il mieux traiter son patron de « nul » ou de « fils de pute » ? Que risque-t-on en lui proposant d'aller se faire foutre ? Si l'affaire finit au tribunal, un cadre et un chauffeur routier ont-ils les mêmes chances ? Et pourquoi Doc Gynéco a-t-il apporté une contribution majeure à la question ? Eco89 a sélectionné dix perles juridiques, à garder en tête en cas d'engueulade.

Insulter son chef, c'est risqué : les sanctions peuvent aller du simple avertissement au licenciement pour faute grave, avec départ immédiat et sans indemnités. C'est aussi un art subtil : les expressions les plus déplacées ne sont pas forcément celles que vous croyez. L'essentiel n'est pas de choisir les bons mots, mais le bon moment.


« Tu me fais chier ! »

C'est bon à savoir : lancer un gros mot, ce n'est pas forcément injurier. La Cour d'appel de Douai a donné raison à une salariée qui avait rétorqué à son chef : « Tu me fais chier et tu m'emmerdes. » Pour les juges, « de tels propos, certes déplacés et peu révérencieux, ne constituent pas pour autant des injures au sens propre du terme ».

« Allez vous faire foutre ! », avait lancé de son côté un salarié qui refusait de venir travailler le week-end. Selon la Cour d'appel de Versailles, « les propos qui lui avaient été reprochés avaient été tenus dans des circonstances particulières leur ôtant tout caractère injurieux ».

Ces jugements favorables ne signifient pas la réintégration dans l'entreprise. Mais en annulant la qualification de « faute grave », ils obligent l'employeur à verser les indemnités dont le salarié a été privé lors de son licenciement.

« Boeufs ! »

Inversement, on peut injurier sans utiliser de gros mots. Cette secrétaire croyait peut-être s'en tirer à bon compte en qualifiant son directeur de « nul » et d'« incompétent », et les chargés de gestion de « boeufs ». Raté : la Cour de cassation lui a donné tort.

Les juges en ont profité pour rappeler l'équilibre subtil entre la liberté d'expression du salarié, garantie par le code du Travail, et les exigences de la vie en entreprise :

« Si le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, d'une liberté d'expression à laquelle il ne peut être apporté que des restrictions justifiées par la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché, il ne peut abuser de cette liberté en tenant des propos injurieux, diffamatoires ou excessifs (…). Ces propos injurieux et excessifs constituaient un abus dans l'exercice de la liberté d'expression. »

« Con ! »

C'est peut-être le premier mot qui vous viendra à la bouche pendant votre prochaine engueulade. Maniez-le avec prudence, mais il ne justifiera pas forcément un licenciement pour faute grave.

La preuve avec ce directeur d'une coopérative laitière, mis à la porte après
avoir déclaré que le président du conseil d'administration était « con »,
et que les administrateurs étaient des « imbéciles » et des « incapables ». Pour la cour de cassation, il « avait seulement traduit en termes énergiques ses réserves ».

« Chochotte ! »

En fait, la gravité des injures varie selon le contexte. Une salariée d'une maison d'édition avait ainsi traité son chef de « chochotte ». La Cour d'appel de Paris a estimé que c'était excusable :

« L'incident s'était déroulé dans un contexte de tension pour l'intéressée lié à la restructuration de son service et à l'arrivée d'un nouveau chef alors qu'elle comptait 24 années d'ancienneté dans l'entreprise sans incident. »

Ceci dit, cette salariée a aussi bénéficié d'une erreur stratégique de son patron. La lettre de licenciement ne mentionnait que le terme « chochotte ». Les autres injures proférées ce jour-là (« pédé », « sale type ») n'avaient donc pas de valeur juridique, mais elles auraient peut-être conduit les juges à se montrer moins indulgents.

« SS ! »

Certaines références historiques doivent être maniées avec prudence. Un employé d'une usine de peinture industrielle a néanmoins obtenu gain de cause après avoir lancé : « Vous me faites chier et j'en ai marre de vos méthodes de kapo et de SS. »

Des injures particulièrement blessantes pour le patron, mais l'employé ignorait « que la plus grande partie de la famille de monsieur A. avait péri dans les camps de concentration nazis », a noté la Cour de cassation. Elle a préféré souligner une « exaspération légitime » et « la détérioration grave du climat existant entre le salarié et l'employeur ».

Pendant l'entretien préalable au licenciement, le salarié n'a pas retiré ses propos… mais il a admis « qu'il aurait mieux fait de traiter monsieur A. de “CRS” ».

« Mettez-vous cette note au cul ! »

Votre ancienneté peut aussi vous protéger. Un VRP l'a ainsi emporté devant la Cour de cassation après s'être exprimé ainsi : « Vous pouvez vous mettre cette note au cul, je pisse dessus. » « Un comportement (…) d'une rare violence et d'une rare grossièreté », selon les juges, mais excusable :

« Le salarié qui avait 22 ans d'ancienneté dans l'entreprise et avait donné entière satisfaction dans son activité s'était laissé emporter par une brève colère. »

« Fils de putes ! »

En Catalogne, un tribunal a estimé que l'injure « fils de pute » était devenue d'un « usage courant ». La justice française n'en est pas encore là, mais elle peut se montrer indulgente si la grossièreté fait partie de votre fonds de commerce.

C'est la jurisprudence Doc Gynéco. EMI avait rompu le contrat du rappeur après un rendez-vous mouvementé, conclu sur cette tirade : « Je ne peux pas faire de musique avec des fils de putes et des chiens errants. » Verdict un rien moqueur de la Cour d'appel de Paris :

« Le “rap” correspond à un style de musique et de chansons qui n'est pas particulièrement “académique”, ni dans ses sonorités ni, la plupart du temps, dans ses paroles, ni même quant à ceux qui le chantent.

Dès lors, la SA EMI Music France, société de production de musique, qui soutient ce genre de productions et promeut cette musique, à tout le moins pour des raisons commerciales et financières, est par conséquent malvenue à s'étonner voire à s'émouvoir des termes employés par ses interlocuteurs. »

« Pas là pour faire la pute ! »

Doc Gynéco n'est pas le seul à pouvoir placer le terme de « pute » dans ses conversations professionnelles. Un chauffeur de poids lourds a ainsi obtenu gain de cause devant la Cour de cassation après avoir déclaré à son chef : « Je ne suis pas là pour faire pute ! »

En effet, à en croire la jurisprudence, la gravité d'une injure varie selon les secteurs professionnels. Concernant les propos de ce chauffeur, les juges ont estimé « que leur vulgarité n'excédait pas les limites de ce qui est admissible dans l'univers professionnel des chauffeurs routiers ».

« Manipulateur ! »

Une erreur à éviter : injurier son supérieur en public. L'injure sera en effet considérée comme plus humiliante que si elle avait été lancée en tête-à-tête, et l'employeur pourra produire des témoins en cas de procédure aux prud'hommes.

Lors d'une réunion de direction, un imprimeur a ainsi décrit son patron comme « sournois », « manipulateur » et « malhonnête ». Il est allé jusqu'en cassation pour contester son licenciement, en vain. Verdict des juges :

« Les qualificatifs étaient d'autant plus reprochables qu'ils avaient été adressés au gérant devant témoins et qu'ils ne pouvaient être justifiés ni par un accès de colère, ni par le contexte de la réunion, l'attitude ou les propos des autres participants. »


« Enculé ! »

Si votre chef ne surveille pas son langage, l'injurier sera moins risqué. C'est l'enseignement de ce conflit entre deux frères. Le premier dirige un laboratoire de prothèses dentaires et a embauché le second, puis il l'a licencié, notamment pour avoir déclaré :

« Si tu as des couilles tu n'as qu'à me licencier. Je n'attends que ça. Licencie-moi, de toute façon tu n'es qu'un enculé (répété plusieurs fois) je vais t'en mettre une, de toute façon je vais te choper sans témoin, le labo je vais te le couler. »

Une tirade violente, mais finalement excusée par la Cour de cassation. Le patron était en effet connu pour son agressivité et ses remarques blessantes. Il avait notamment déclaré devant témoins à son frère :

« Quand je t'ai embauché tu n'étais qu'un clochard, sans moi tu n'es rien, je t'enverrai pleurer à l'assistance sociale pour bouffer ; pourquoi tu ne pars pas toi-même, tu t'accroches aux branches. »

Merci à Susana Lopes Dos Santos, avocate au cabinet Ravisy & Associés, pour ses éclairages juridiques.

Le Parti pirate combat un système de pensée...



À l'origine du Parti pirate : une initiative suédoise lancée en 2006, puis rapidement imitée en France et dans une trentaine d'autres pays. Aujourd'hui, le mouvement représente la troisième force politique en Suède, la sixième en Allemagne, et possède son propre député européen.
Aux dernières élections législatives dans les Yvelines, Maxime Rouquet réalisait un score de 2,08% comme candidat de ce mouvement, loin des 0,3% visés, dans une campagne "sans affiches, sans tracts, sans moyens". Après cette élection, quel avenir pour le Parti pirate, notamment en vue des régionales de 2010 ?
Valentin Villenave, musicien de 25 ans, numéro deux du parti, répond au Nouvelobs.com.

Quel est votre programme ?
Le Parti pirate milite sur trois points essentiels. Tout d'abord, pour un large respect des libertés civiques et des droits de l'homme, jusque dans sa vie privée. Ensuite, pour la reconnaissance du droit d'accéder au savoir et à la culture, et pour la décriminalisation des citoyens qui se livrent au partage de ceux-ci. Enfin, nous appelons à une réforme majeure des brevets pharmaceutiques et biotechnologiques, pour que le tiers-monde ne soit plus soumis à deux ou trois monopoles privés.

Vous êtes surtout connus pour votre opposition à la loi Hadopi.
Cette loi mérite d'être dénoncée. Hadopi présente énormément de défauts, c'est une sorte d'acharnement thérapeutique pour réanimer un cadavre. Mais au-delà d'Hadopi, le Parti pirate combat un système de pensée. On est dans une période où pour la première fois presque tout le monde, en théorie, peut avoir accès au savoir universel, à la connaissance. Au lieu de promouvoir un meilleur accès à l'intelligence collective, les progrès technologiques sont instrumentalisés au profit de quelques-uns. La société a vécu une révolution avec Internet. Il faut en prendre acte !

Où êtes-vous le mieux implanté ?
En France, nous sommes éparpillés un peu partout sur le territoire. Beaucoup de membres se localisent à Toulouse, en Bretagne, ou en Alsace. Curieusement, peu en Ile-de-France. Mais cette répartition pose des problèmes et surtout des questions pour les prochaines échéances comme les régionales. Pour les Européennes, nous n'avons pas été en mesure de réunir une liste complète.
A l'international, de la France au Brésil en passant par la Pologne, les Partis pirates constituent un véritable réseau d'information : dès qu'une loi liberticide se profile quelque part, on est tous au courant. Après, le Parti pirate fonctionne très bien dans les pays de l'Est (la Suède et l'Allemagne) et du Nord-Est (Danemark et Finlande).

Quel est le profil-type de vos membres ?
Il n'y a pas vraiment de profil-type, même s'il y a forcément un côté geek. On recense 90% d'hommes, mais aussi des mères de familles, des retraités plus ou moins soixante-huitards, des artistes, etc. Je regrette qu'il n'y ait pas plus de femmes.

Et pour votre électorat ?
Nos plus forts scores se font chez ceux qui votent pour la première fois. Donc, on retrouve surtout des jeunes et particulièrement des gens désabusés de la politique qui trouvent notre démarche intéressante. Les gens se sentent concernés par la loi Hadopi, beaucoup plus que pour l'obscure loi DADVSI trois ans plus tôt. Et puis, l'intitulé "Parti pirate" accroche.

Vous appelez vos électeurs à pirater ?
Nous considérons que partager la culture n'est en rien criminel. La vraie question sur les droits d'auteurs est : à qui profite le système actuel ? Aux éditeurs, aux maisons de disques, aux sociétés de gestion de droits d'auteurs ! Partager la culture hors du cadre payant, est-ce préjudiciable aux artistes et auteurs ? Selon plusieurs études indépendantes sur le sujet, la réponse est non. Pour l'instant, il n'y a jamais eu une quelconque preuve que l'échange de fichiers ait eu impact sur les ventes de disques. Le secteur de la musique est en crise, et le serait sans le téléchargement. Avec Hadopi, les industriels de la musique ont fait voter une loi dans leur intérêt. Aujourd'hui, la question du droit d'auteur doit être redonnée aux auteurs.

C'est-à-dire ?
Il faut se poser la question de la place de l'auteur. Personnellement, je suis professeur au conservatoire. Voir les inspecteurs de la Sacem [société de gestion des droits d'auteurs, NDLR] effectuer des descentes en plein cours pour fouiller les cartables d'élèves à la recherche de photocopies "illégales" de partition, c'est révoltant ! En tant qu'auteur, je ne peux cautionner ce système. Ainsi, pour le dernier opéra que j'ai écrit, j'ai opté pour une licence libre laissant ouverte l'utilisation de mes partitions. À aucun moment, je ne me suis senti floué sur mes droits d'auteurs. Un autre exemple : lors d'une fête de fin d'année dans une école primaire, les enfants chantaient "Adieu monsieur le professeur" d'Hugues Auffray, pour le départ de leur directeur. Les inspecteurs sont alors intervenus et ont infligé une amende à l'école pour ne pas avoir payé de droits d'auteurs. Hugues Auffray, premier indigné, a tenu à payer l'amende. Le système est devenu complètement fou...

Le Parti pirate est-il sollicité pour des conseils ?
Du côté des artistes, le Parti pirate entre régulièrement dans une dimension pédagogique pour présenter les licences alternatives aux sociétés de gestion des droits d'auteurs. Par rapport aux politiques, la logique est souvent celle du rejet. Seuls les Verts semblent partager nos convictions, puisqu'ils recopient certaines de nos propositions, mais continuent d'avoir peur que l'on leur prenne des voix. Néanmoins, pour les politiques en place, on représente un énorme potentiel.

Financièrement, comment fonctionne le Parti pirate ?
Pour l'instant, il ne fonctionne pas. On survit dans la mesure où on n'existe que sur Internet et que les dépenses sont limitées, à part l'hébergement du site que je paye moi-même. Le problème ce sont les banques. Une douzaine de banques nous ont envoyé balader lorsque de l'ouverture d'un prêt "au nom du Parti pirate". Nous avons d'ailleurs dû déposer un recours devant la banque de France. On est encore loin des Allemands et Suédois qui possèdent leurs propres locaux avec des employés permanents...

Boris Manenti

Plus d'informations sur le site du Parti pirate.

Tigre blanc de Bengale




Au zoo de Singapour, la photographe Birte Person a capturé ces images incroyables d’un tigre du Bengale en pleine frénésie alimentaire. L’espèce est menacée et la plupart des individus encore vivants vivent en captivité.